Sorti du bain, une sensation plutôt violente me happe vigoureusement le bas ventre. Je regarde le bain en bois, des goulettes fumantes s’échappant de sa base. J’évalue rapidement ce qui se passe, et mon jugement me confirme que ce ne sont pas les 3300 pieds d’altitude qui affectent mon corps ainsi. Ma perte soudaine d’une livre bien pesée, et le rétrécissement tout aussi spontané d’une extrémité de mon corps me rappellent les 5 degrés non chauffés de notre chambre tibétaine.
Pour y remédier, l’hôtel a mis à la disposition des courageux backpackers qui osent se rendre à cette frontière du Tibet un warm house. Y pénétrer, c’est instantanément allumer en soi tous les souvenirs d’après-ski qu’on peut avoir. C’est entrer un lieu presque saint où l’âme se détend en deux temps, trois mouvements.
Vous comprenez donc que c’est dans ce douillet endroit que je me suis dirigé pour retrouver mes attributs masculins, confortablement assis près du foyer crépitant. Patientant jusqu’au moment où le jour serait assez avancé pour que le soleil nous chauffe le cul, Julie et moi entamâmes une partie de Skip-Bo (au passé simple, ça s’écrit de même !). Harish, savant chinois travaillant pour le guesthouse, nous observe d’un œil aiguisé. Plus intelligent que votre blogueur, il m’a indiqué une manœuvre sans que je ne lui demande.
Au bout de deux ou trois games, on décide de l’inviter à se joindre à nous. Il accepte presque nerveusement. Les quatre premiers rounds nous permettent de mesurer ses stratégies plus hésitantes. Après ça, c’est la débandade : Julie et moi ne l’aidons presque pas, et il comprend mieux le jeu que ne l’aurait fait n’importe quel québécois avec deux ans d’expérience.
Ça m’a pris tout un bail avant de battre Julie sans qu’elle ne me laisse gagner. Harish nous a battu du premier coup, avec presque pas d’aide. J’ai regardé Julie, et je lui ai dit « Rappelle-toi de ça, on vient de vivre un moment ». Le warm house venait de nous réchauffer le cœur. Ah, et j’oubliais : Harish ne parle pas anglais. Et moi, encore moins mandarin.
Très beau texte et belles photos!
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